lundi 15 octobre 2018

Réflexions vétérinaires au sujet du cannabis

La légalisation du cannabis nous oblige, en tant que vétérinaires, à réfléchir à 2 aspects de la question.



Question #1 - Est-ce que le cannabis médicinal peut être utilisé en médecine vétérinaire?

La possibilité de l’usage du cannabis médicinal chez les animaux suscite l’intérêt de la profession vétérinaire et des propriétaires d’animaux. En médecine humaine le cannabis est utilisé comme antibactérien, antioxydant, pour le traitement de l’anxiété, le soulagement de la douleur et pour combattre les nausées, vomissements et démangeaisons. Il peut donc être prescrit dans le cas de  certains cancers, lors de chimiothérapie, dans les cas d’arthrose, d’épilepsie et de certaines maladies inflammatoires intestinales.

Poser l’hypothèse que le cannabis peut être utilisé chez les animaux pour les mêmes conditions et avec les mêmes effets, c’est faire un raccourci dangereux. On ne peut pas extrapoler en pharmacologie animale à partir d’études sur les humains.

En médecine vétérinaire, nous savons qu’il y a beaucoup de médicaments qui ne conviennent pas à une espèce animale alors qu’ils fonctionnent très bien dans le cas d’une autre. Qu’une même molécule ne sera pas efficace à la même dose chez le chat et le chien par exemple. Qu’un médicament anodin chez l’humain peut être risqué chez nos petits animaux. Citons le cas de notre très efficace acétaminophène, qui peut faire mourir un chat et rendre un chien très malade, voire le tuer dépassé un certain dosage.

Pour obtenir l’approbation ou l’homologation d’une molécule par la direction des médicaments vétérinaires, les compagnies pharmaceutiques doivent démontrer au moyen d’études que celle-ci est sécuritaire et efficace dans telles conditions et à telles doses.

L’usage médical du cannabis a peu été le sujet de recherches sérieuses et d’études probantes sur son efficacité dans le traitement chez les animaux. Le fait que le cannabis est illégal rend ces études plus complexes à réaliser. Maintenant qu’il deviendra légal au Canada, on peut espérer que cette situation changera et que bientôt nous aurons à notre disposition des faits objectifs appuyant l’usage (ou le non-usage) du cannabis chez l’animal et dans quelles conditions particulières et à quels dosages bien précis.

D’ici là, les vétérinaires québécois n’ont aucune façon légale et éthique de le prescrire. 

Question #2 - La légalisation du cannabis augmentera-t-elle les intoxications chez les petits animaux de compagnie?

Les états américains où le cannabis a été légalisé ont vu leurs statistiques  de cas d’intoxications augmenter.

L’accès accidentel au cannabis, surtout s’il est dissimulé dans une nourriture comme un biscuit ou un muffin, sera facilité. De même que l’exposition à la fumée secondaire sera possible dans les demeures québécoises.

Par contre, les propriétaires seront peut-être davantage à l’aise de le déclarer à leur vétérinaire lors de l’examen de leur animal.

Le danger d’intoxication peut aussi survenir si un propriétaire tente de « soigner » son animal avec du cannabis, surtout s’il s’agit de cannabis récréatif, plus élevé en THC.

En tant que vétérinaire, on ne peut que mettre en garde contre  cette pratique abusive. Car bien que l’intoxication au cannabis soit rarement mortelle, elle entraîne des symptômes désagréables pour l’animal et des risques pour sa santé.

Les signes cliniques de l’intoxication sont d’abord neurologiques :

Perte d’équilibre, désorientation, hyperesthésie (réaction exagérée à un stimulus normal), léthargie ou hyperactivité, vocalisations, dilatation des pupilles, hyper ou hypothermie, perte de conscience, coma et plus rarement la mort.

Il peut y avoir aussi vomissements, incontinence, bradycardie ou tachycardie (fréquence cardiaque trop lente ou trop rapide).

Les signes peuvent mettre de 5 à 30 minutes à apparaître, mais durer de 18 à 72 heures. 

Les cas les plus sévères peuvent nécessiter des soins de support médicaux.  Selon l’âge et l’état de l’animal, cela peut entraîner des complications et des risques pour sa santé.

Si cette nouvelle disposition légale du cannabis entraîne son lot de questionnements aux politiciens, policiers, éducateurs et médecins humains, nous, les vétérinaires, avons aussi à nous pencher sur ce dossier afin de bien répondre à notre clientèle, mais surtout, afin de bien soigner nos patients.


Sources : 
Veterinary Practice news Canada, vol 1, no 1, sept 2018, 
Le Vétérinarius la revue de l’OMVQ, vol 34, no 4, automne 2018 
Blackwell’s Five minute Consult Clinical Companion: Small Animal Toxicology, second ed. 2016 



mercredi 6 juin 2018

L’exercice physique, bon aussi pour les petits animaux

Les animaux ont eux aussi besoin de faire de l’exercice, car l’immobilisation ou le non-usage du corps entraîne des effets négatifs sur les tissus. Les muscles s’atrophient. Les ligaments et tendons deviennent plus raides et perdent de leur élasticité. Les os peuvent devenir plus faibles et plus cassants. Les articulations sont moins souples et leur amplitude de flexion et d’extension est plus petite. Les cartilages s’amincissent et absorbent moins bien les chocs.  L’endurance cardio-respiratoire diminue.

Faire de l’exercice quotidiennement protège de ces méfaits.  Mais que considère-t-on comme étant de l’exercice chez les petits animaux?

Crédit photo : Marcus Benedix sur Unsplash
Si une marche de 30 minutes par jour est reconnue comme un exercice modéré chez l’humain, pour un chien il ne s’agit que d’une dépense énergétique minime.

Comparons nos deux métabolismes, humain et canin, à ceux d’animaux sauvages dont nous sommes génétiquement proches, soit le singe pour l’humain et le loup pour le chien. 

Dans la nature, pour se nourrir les loups doivent chasser et courir de longues distances.  Leur organisme est conçu en conséquence. Même si l’exercice est très exigeant, leur métabolisme peut le tolérer sans s’amaigrir ou s’affaiblir. S’il fallait qu’un loup maigrisse dès qu’il se met à courir, l’espèce ne serait pas viable. 


Les singes au contraire se déplacent lentement pour se nourrir. Il cueille des fruits et des noix, ce qui est l’essentiel de leur diète. Donc le métabolisme d’un singe (ou d’un humain) qui se met à marcher rapidement ou à courir tous les jours va réagir en brûlant des calories. Pour un primate (grand singe, orang-outang, gorille, humain), il s’agira d’un exercice digne de ce nom. Mais pour un canidé, c’est beaucoup moins le cas. 

Lorsqu’il marche, le chien ne dépense pas beaucoup d’énergie, son poids étant porté par ses quatre  membres. Et l’amplitude de l’enjambée nécessaire au déplacement n’est pas maximale. Le trot et bien sûr le galop à la course sont des allures bien plus efficaces et considérées comme de « vrais exercices ».  

Par contre, vous pouvez faire faire une panoplie d’exercices physiques à votre chien (et à votre chat) pour améliorer ou conserver sa masse musculaire et la santé de ses tissus; tendons, ligaments, os et cartilages. Ajouter des obstacles à contourner ou à franchir lors de sa promenade quotidienne contribuera déjà à stimuler davantage l’effort musculaire. 

Ajuster vos « jeux » à la taille de votre animal, à son âge et à sa condition physique en général. Vous serez surpris de sa motivation. Tout comme pour l’humain, l’exercice chez les petits animaux améliore leur santé physique et a un effet psychologique sur leur moral.

L'équipe de la Clinique vétérinaire St-Augustin-de-Mirabel sera à la journée canine "Bouger avec son chien" ce samedi 9 juin au Parc régional éducatif bois de Belle-Rivière! Détails : https://www.facebook.com/events/289356794930662/



vendredi 26 janvier 2018

Les animaux aînés

Selon la taille et le poids correspondant à la race de votre animal, on le considérera âgé à 6 ans (très grandes races et grandes races, plus de 50 lbs /22.7 kg) ou à 9 ans (petites races et races moyennes jusqu’à 50 lbs/22.7 kg).  Ainsi, pour généraliser, nous disons que vers l’âge de 7 ans un animal de compagnie rejoint le rang des aînés.

Cela ne signifie pas, loin de là, que votre animal est un vieillard impotent!  Mais cela permet de mettre les choses en perspective et réaliser que l’espérance de vie de votre chien ou de votre chat n’est malheureusement pas la même que la vôtre et que sa santé peut changer rapidement dans une même année, puisque cela peut représenter 7 ou 8 ans en âge humain.

Plusieurs maladies de l’animal aîné peuvent passer inaperçues au début et les changements qu’elles occasionnent peuvent être difficiles à percevoir. Bien que ressentis par l’animal lui-même, ils ne sont pas assez dérangeants pour qu’il vous le « dise ».

Par exemple, ce n’est qu’au stade avancé d’un diabète que votre chien ou votre chat se mettra à boire et à uriner beaucoup et pourtant cela fait probablement plusieurs mois que la maladie se développe sans que personne ne remarque quoi que ce soit.

C’est pourquoi la prévention est si importante.  L’état de santé future de l’animal aîné dépend de la détection rapide et du traitement précoce  de la maladie. 
Un examen vétérinaire et des analyses de laboratoire peuvent identifier certains risques pour la santé avant même que ne se manifeste la maladie. 

Votre observation de l’état général de votre animal peut aussi nous aider à évaluer sa santé et à contribuer à prévenir les effets négatifs du vieillissement sur son bien-être.

Surveillez tous signes de changements au niveau de son poids, de son appétit ou de l’élimination de ses selles et urines. Observez sa peau et son pelage mais aussi son comportement et comment il se déplace. Observez s’il a de la difficulté à se lever, à sauter ou à grimper.

Prévenez-nous de tout changement avant qu’il ne devienne sérieux.  Vous êtes la personne la mieux placée pour détecter précocement les signes d’une maladie qui affecte votre animal aîné. Ensemble nous pourrons faire en sorte que cette étape de sa vie soit la meilleure possible.